Modiano, sans oubli possible

Écrire pour que la vie résiste au grand vide de l’oubli aura conduit Patrick Modiano à cette Place de l’Etoile définitive qu’est le prix Nobel de littérature.
Cet arpenteur des Boutiques obscures, a cherché toute sa vie à donner une consistance au sentiment le moins concret du monde, l’absence. Absence du père, aventurier juif interlope dont il perd la trace à dix-sept ans, abandon de la mère, actrice flamande qui choisit sa carrière plutôt que ses enfants, perte du frère dont il était inséparable et qui meurt à dix ans d’une leucémie, bouchant à jamais son horizon. Le passé, ne peut être modifié, “il ne peut pas passer”. Reste le souvenir. Pour sauver nos vies qui passent si vite avant de retourner au néant,l’écrivain nous souffle son credo : tant qu’il y aura une mémoire, rien n’aura été inutile, rien n’aura été passager.

Lui qui cultive l’art de disparaître, et dont l’élégance discrète semble ne pas vouloir déranger, se transforme en fin limier, en enquêteur précis dont la mission consiste à ranimer les déportés de la Shoah (Dora Bruder), ou ce qu’il nomme les Fleurs de ruine et autres cafés de la jeunesse perdue. Le hasard est merveilleux a écrit Novalis. Chez Modiano, c’est le style merveilleux qui sublime toute remise de peine.A l’impératif de se conjuguer au futur perpétuel, Modiano répond par la patience, la distance, construisant une oeuvre qu’aucun nuage virtuel ne saurait enfermer.

http://firstluxe.com/magazines/hiver-2014/#page/21

Sans titre

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