CARTHAGENE DEPARDON/LOUSTAL Par Corinne Lellouche
Quand deux regards du siècle embarquent ensemble pour Carthagène, ex-plaque tournante du trafic d’or et d’esclaves, cela donne la lumière de Magnum mêlé à l’humour sérieux des éditions Dupuis. L’oxymore vaut pour Raymond Depardon et Jacques de Loustal qui prouvent ici que photographies et dessins peuvent créer une tendresse impitoyable. Les vendeurs de bouées ou de massages – mais des pieds, – croisent une constellation d’oiseaux et d’impressions de voyage que la plume de l’un renvoie à la vivacité photographique de l’autre. Le blanc lunaire, le bleu azur, l’ivoire, le jais, l’indigo chaud appellent le pastel, la douceur de nuances que la main réinvente. C’est unique, inhabituel, surprenant, au point de tourner et retourner les pages comme on se pincerait quand on rêve. Surtout ne pas se pincer, profiter d’un album d’où s’échappe tout le bonheur du dénuement au soleil.
Carthagène, de Loustal et Depardon, Dupuis/Magnum Photos, « Aire Libre », 128 p., 30 €.