Les animaux fantastiques de Sean Landers exposés au Musée de la Chasse et de la Nature

Animal Kingdom, exposition événement signe le retour de Sean Landers ( né en 1962), grand représentant de l’art contemporain américain et de la peinture figurative en France, depuis sa rétrospective au Consortium de Dijon en 2020.

C’est un bonheur de parcourir le Musée de la Chasse et de la Nature, à la recherche des merveilleux portraits animaliers en tartan écossais ou en faux bois et des sculptures de cet artiste majeur, très prisé des collectionneurs américains et européens. L’exposition présente une trentaine d’œuvres conservées essentiellement dans des collections privées. Des bronzes complètent le parcours, et deux portraits animaliers ont été spécialement réalisés pour le Musée de la Chasse et de la Nature.

Exposition Sean LANDERS, Musée de la chasse et de la nature. @David GIANCATARINA
Wood Chimp, Sean Landers, 2020. Huile sur toile de lin, 96,5 x 81,3 cm © Sean Landers, courtesy Rodolphe Janssen, Brussels. @Christopher Burke Studio
Exposition Sean LANDERS, Musée de la chasse et de la nature.@David GIANCATARINA.

La figuration 
comme choix politique

L’ostensible fausse naïveté et la fantaisie trompeuse de cette peinture figurative inspirée de la peinture européenne – celle de l’art du portrait de la Renaissance, celle du paysage romantique du xixe siècle ou celle des Surréalistes – met en lumière une affirmation tant politique qu’esthétique des choix de l’artiste. Formé à Yale University School of Art dans les années 1980, il explique l’adoption de la figuration comme une prise de position alternative, un chemin dangereux mais dès lors fatalement irrésistible : « Faire de la peinture figurative quand j’étais en école d’art, c’était le mauvais choix à faire à l’époque, quand on nous enseignait l’art minimal et conceptuel. On pensait que c’était absurde, risible, et donc évidemment, comment pouvais-je bien y résister ? ».

Le monde animal en miroir de soi

Artiste conceptuel, Sean Landers utilise son expérience personnelle comme sujet. Entre biographie et fiction, il met en scène sa vie d’artiste dans un mode d’exposition de soi qui résonne aujourd’hui avec la monstration de nos vies sur les réseaux sociaux : artifice, truchement, faux-semblant… Avec humour et peut-être ironie, il met ainsi à mal l’ego de l’artiste dans The Urgent Necessity of Narcissism for the Artistic Mind (Jaguar), où un jaguar au pelage tartan rose et vert devenu Narcisse, s’abreuve littéralement de son reflet dans une mare. Pour arrière-plan, tel un diorama de musée d’histoire naturelle, une forêt de troncs d’arbres se développe en écho narcissique, gravés du prénom de l’artiste répété à l’infini : Sean, Sean, Sean…

The Urgent Necessity of Narcissism for the Artistic Mind (Jaguar), Seal Landers, 2014, Huile sur toile de lin, 127 x 165,1 cm
© Sean Landers, courtesy Petzel Gallery, New York. @ Larry Lamay. Musée de la Chasse et de la Nature. Exposition Sean Landers

Hommage à Magritte

Depuis plus de dix ans, Sean Landers développe sa série d’animaux à la fourrure écossaise. Cette utilisation incongrue du tartan, en trompe-l’œil, se pose en double référence à Magritte : aux pantoufles écossaises que le surréaliste belge portait pour peindre. Et à sa période dite « vache » de 1948 où dans un style volontairement grossier il sape la notion de « bonne peinture ». Cette série de peintures dans lesquelles Magritte caricaturait son propre style, a exercé une grande influence sur la pratique artistique de Landers et l’a amené à s’interroger sur son rapport d’artiste à son travail.

Un parcours en dialogue avec les collections du Musée

Exposition Sean LANDERS, Musée de la chasse et de la nature. @David GIANCATARINA
Exposition Sean LANDERS, Musée de la chasse et de la nature. @ David GIANCATARINA

La salle d’exposition temporaire du Musée de la Chasse et de la Nature est entièrement consacrée à cette série. Ensuite, dans les salles du Musée, en dialogue avec les collections permanentes et notamment avec les animaux naturalisés partiellement redéployés pour l’occasion, on part à la rencontre d’une parade d’animaux tout autant merveilleux que mystérieux : Cerf, yak, ourson arborant une toison en tartan écossais, lion et singe au pelage faux-bois, lapin ou coq fixant avec intensité leurs observateurs pour interroger peut-être leur propre humanité. L’exposition s’ouvre à d’autres séries qui ponctuent le parcours artistique de Sean Landers montrant notamment l’extrême importance du texte et de l’écrit dans son rapport au Surréalisme : forêt de bouleaux aux troncs couverts d’écritures entaillées dans le bois ou bibliothèque exposant ses titres fantaisistes comme autant de devinettes ou de confessions de l’artiste.

Sean Landers et Christine Germain-Donnat, directrice du musée de la Chasse et de la Nature devant l’oeuvre La forêt de bouleaux. Stopping by Woods on a Snowy Evening, Sean Landers, 2015. Huile sur toile de lin, 152,4 x 198,1 cm. © Sean Landers, courtesy Rodolphe Janssen, Brussels.

Sean Landers devant son avatar, Plankboy (Pygmalion).Sean Landers, 2019. Huile sur toile de lin, 109,2 x 149,9 cm .© Sean Landers, courtesy Rodolphe Janssen, Brussels.

Exposition « Animal Kindom » au Musée de la Chasse et de la Nature jusqu’au 10 mars 2024. 62 rue des Archives 75003 Paris. 
Ouvert du mardi 
au dimanche
de 11h à 18h
 (dernier accès 17h30). Nocturnes le mercredi jusquʼà 21h30 (dernier accès à 21h) sauf juillet et août
. Fermé le lundi et les jours fériés. Tél : 01 84 74 06 48. Tarif : 10 €
 à 12 €. www.chassenature.org

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